Ce sujet m’a été demandé par mail de la part d’une mère adoptive et je la remercie. Pour certains parent adoptifs, il n’est pas évident de savoir comment annoncer à son enfant qu’il a été adopté. Dans cet article, nous traitons le sujet en plusieurs points.
Cet article est principalement inspiré du travail de recherche de Nancy Newton Verrier, psychologue clinicienne et mère adoptive. La touche personnelle est issue de mon expérience en tant qu’adopté moi-même, et des personnes que je rencontre en consultation en tant que psychopraticien. Chaque sujet englobe une généralité sans pour autant la conditionner ; l’humain étant complexe, chaque vécu est différent. Je vous invite donc à prendre du recul puis ne garder que ce qui vous parle. Bonne lecture !
Pourquoi certains parents cachent à leurs enfants qu’ils sont adoptés ?
Tous les parents veulent une chose pour leurs enfants : leur bonheur. Lui annoncer qu’il a été adopté, c’est prendre le risque de le « perturber » et de l’en privé un temps, certes. Mais certains parents pensent sincèrement que lui éviter cette « perturbation » le protégera en prétextant : « C’est pour son bien. »
Cependant, si on observe de plus près… les raisons sont nombreuses :
- Peur de ne plus être reconnu comme parent et de perdre l’amour de son enfant
- Peur de perdre son respect
- Peur que cela perturbe sa vie scolaire
- Peur que les choses ne se passent pas comme « l’idéal » familial qu’on avait imaginé avec lui
Il est vrai que certaines circonstances qui ont conduit à l’adoption peuvent être « traumatisantes » : histoire de viol, décès d’un des parents biologiques, famille instable, voire assassinat… la liste peut être longue.
Dans ces conditions… on peut en effet se demander si toute vérité est bonne à dire. D’où le dicton : « Ce qu’on ne sait pas n’affecte pas. »
Alors pourquoi, malgré toutes ces raisons, ne pas garder ce secret afin de ne blesser personne ?
Pourquoi dire à votre enfant qu’il a été adopté ?
Si vous suivez mon blog, vous savez que la séparation avec la mère biologique crée la blessure primitive dans la mémoire implicite de l’enfant, quel que soit son âge.
Sans pouvoir l’expliquer, votre enfant peut avoir le sentiment d’être inadapté au sein de votre famille ou/et de la société. La plupart du temps, il cherchera sa place mais aura l’impression de ne jamais la trouver complétement.
S’il développe des mécanismes de déni face à cette situation, il pourra vivre une vie épanouie du point de vue extérieur et peut-être même s’en convaincre lui-même. Cependant, quelque chose restera toujours irrésolu dans son inconscient.
Cette situation peut très bien durer toute sa vie, comme faire de lui une bombe à retardement.
Lors des consultations, j’ai rencontré des adoptés dont leurs parents avaient cachés leur adoption. Résultat : leurs enfants avaient le sentiment d’être passés à côté de leur vie : dépression, burn-out, auto-sabotage, sentiment d’inadaptation, etc.
Le travail fut de les accompagner dans cette renaissance. Fragile peut-être… mais nous avons exploré, derrière leur faux Self, ce dont ils faisaient le déni auparavant, afin de s’autoriser enfin à être eux-mêmes, même si ce secret aura laissé des séquelles psychologiques dues à de nombreuses souffrances impossibles à exprimer dans le passé.
L’enfant se souvient… comme l’adulte. Selon moi, c’est une preuve de malveillance envers soi de croire qu’on oublie simplement avec le temps. Nous n’oublions jamais. Le corps garde la trace de chaque mémoire, comme ont pu le prouver les études sur la mémoire implicite et les traumatismes.
Même si votre enfant n’est pas informé du fait qu’il a été adopté… il le sait déjà de façon inconsciente.
S’il l’apprend autrement que par vous-même, le sentiment de trahison sera alors plus grand. La confiance construite durant toutes ces années entre vous risque de s’effondrer. Et plus vous attendrez, plus elle sera difficilement rattrapable.
De mon point de vue professionnel et en tant qu’adopté, il vaut mieux que votre enfant soit au courant de son adoption dès qu’il est en âge de comprendre, afin de se construire avec la réalité de son histoire, plutôt que de ne commencer à le faire qu’à la moitié de sa vie, voire jamais.
Quand et comment dire à votre enfant qu’il a été adopté ?
Se poser la question est un signe de maturité car vous passez au-delà de vos peurs et pensez au bien de votre enfant à long-terme.
Si l’adoption s’est passée de façon commune : pauvreté supposée des parents biologiques, peu d’informations sur eux, voire aucune, dépôt à l’orphelinat… la seule prise de conscience pour l’enfant sera son adoption.
Mais si l’adoption s’est présentée suite à des faits « choquants », sachez qu’il n’y a pas de façon idéale d’annoncer cette vérité.
Seulement deux choix s’offrent à vous :
- Soit vous cachez la vérité à votre enfant, prenant le risque qu’un jour il le découvre, avec les conséquences risquées que ça implique pour votre relation avec lui.
- Soit vous le lui annoncez et faites une pause s’il a besoin de temps pour intégrer la nouvelle. Puis, dans le cas où il veut en savoir plus, vous lui expliquez que les conditions de son adoption n’étaient pas idéales, sans entrer dans les détails, sauf s’il vous le demande.
Personnellement, le deuxième choix me semble être le meilleur.
Quand dévoiler la vérité ?
1) Le plus tôt possible (dès l’âge de comprendre).
Je vais vous faire part de mon expérience personnelle pour vous dire comment on me l’a annoncé :
Quand j’étais petit, je devais avoir 3 ou 4 ans, je me rappelle que je jouais à l’étage de ma maison en haut des escaliers.
Puis, ma mère est arrivée près de moi. Elle s’est mise à ma hauteur et m’a dit gravement : « Jocelyn, il faut que je te dise quelque chose, c’est important… » insistant que je devais bien être à l’écoute. « Tu as été adopté. Tu sais ce que ça veut dire ? Que nous ne sommes pas tes vrais parents. »
Je ne me souviens plus des mots exacts mais c’est comme ça que je l’ai compris. J’ai répondu : « Oui, je sais. » mais dans mon esprit c’était : « Bah oui, je le savais déjà. ». Je me rappelle qu’en effet, j’étais nullement étonné de la nouvelle.
Ma mère m’a laissé continuer à jouer.
Je ne saurai vous dire si ma mère me l’avait dit avant. Elle ne s’en souvient plus et moi non plus. Cependant, vous pouvez constater que mon adoption était une évidence au fond de moi.
Je vous conseille d’ajouter à votre annonce que même si vous n’êtes pas ses parents de sang, vous êtes ses parents de cœur et que vous l’aimez autant que s’il était votre enfant biologique.
2) À l’adolescence.
Si votre enfant est adolescent, il est en plein dans la période où il construit son identité. Lui annoncer son adoption peut, dans certains cas, rendre votre relation explosive, dans le cas ou il aurait un profil rebelle, mais c’est le moment propice pour limiter les dégâts dans sa construction « identitaire. »
Comment ?
Prenez un temps en famille pour annoncer la nouvelle. Si les conditions de l’adoption ont été choquantes, vous pouvez les lui raconter seulement s’il demande à les entendre. Puis, demandez-lui ce qu’il ressent.
Son adoption pourrait lui apporter des explications sur de nombreux ressentis qui le perturbent dans sa vie d’adolescent, et c’est une bonne chose.
S’il est en colère contre vous et qu’il vous en veut, sachez le comprendre et dites-le lui. Il y a donc un temps d’intégration à respecter qui se fera peut-être sur plusieurs jours.
Expliquez-lui pourquoi vous ne lui aviez pas dit plus tôt ; confiez-lui vos peurs.
Dites-lui aussi que vous l’aimez aussi fort que s’il était votre enfant biologique.
3) À l’âge adulte.
Si votre enfant est adulte, il est important de prendre un moment en famille également pour en parler. Comme pour l’adolescent, c’est à votre « grand enfant » de savoir s’il est prêt à entendre les conditions de son adoption même si elles sont choquantes.
S’il est en colère contre vous et qu’il vous en veut, sachez le comprendre et dites-le lui. Il y a donc un temps d’intégration à respecter qui se fera peut-être sur plusieurs jours.
Expliquez-lui pourquoi vous ne lui aviez pas dit plus tôt ; confiez-lui vos peurs.
Et dites-lui aussi que vous l’aimez aussi fort que s’il était votre enfant biologique. Votre rôle en tant que parent est de faire de votre mieux même si ce n’est pas suffisant parfois.
Dans tous les cas, il doit être au courant qu’il n’est pas votre enfant biologique mais de cœur.
Cette annonce pourra lui expliquer certaines, voire de nombreuses, questions qu’il se posait jusqu’à maintenant. Dans certains cas, c’est libérateur.
Qu’importe s’il vous en veut ; vous ne pouvez pas laisser votre enfant adulte continuer à se construire sur un mensonge. À vous de comprendre qu’en tant que parent, vous avez fait de votre mieux.
Conclusion
Si vous annoncez à votre enfant qu’il a été adopté, ce n’est pas pour vous seulement… mais pour lui aussi.
Si malgré cet article, vous avez du mal à vous imaginer lui annoncer une telle nouvelle, ou que vous avez des doutes, je vous invite à en discuter ensemble au cours d’une consultation téléphonique.
Prenez soin de vous.
Mots clés : enfant adopté, parents adoptifs, parents biologiques, blessure primitive, comment annoncer à son enfant qu’il a été adopté
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