Cet article fait suite à celui de Pourquoi certains adoptés se croient fous ? (mais ne le sont pas)… et même s’il permet de comprendre de nombreuses choses au sujet de la blessure primitive, je tiens à développer un point complémentaire pour mieux comprendre cette idée de « perdre pied » ou de « folie » dans le cadre d’une blessure d’abandon ou de rejet forte en tant qu’adopté ; celui de l’univers psychiatrique.
Cet article est principalement inspiré du travail de recherche de Nancy Newton Verrier, psychologue clinicienne et mère adoptive. La touche personnelle est issue de mon expérience en tant qu’adopté moi-même, et des personnes que je rencontre en consultation en tant que psychopraticien. Chaque sujet englobe une généralité sans pour autant la conditionner ; l’humain étant complexe, chaque vécu est différent. Je vous invite donc à prendre du recul puis ne garder que ce qui vous parle. Dans le cadre de cet article, j’ajoute aussi que vous ne devez pas abandonner un accompagnement médical pour une psychothérapie seulement. Un double accompagnement (médical et complémentaire) est plus sûr pour votre santé. Bonne lecture !
Comment les adoptés en souffrance arrivent en psychiatrie ?
Dans le service pédiatrique de Nantes en 2011 (source : ici), le responsable affirme que sur 10 adolescents ayant des troubles du comportement, 3 sont des enfants adoptés. Il y a donc une sur-représentation pour leur classe d’âge.
Personnellement, j’ai rencontré beaucoup d’adoptés ayant côtoyer les milieux médicaux : « hôpitaux, » « service psychiatrique, » « clinique de jour… »
Vous faites peut-être partie des personnes adoptées qui cherchent à mettre un mot sur leur mal-être. Ce qui va suivre n’est pas propre qu’aux adoptés d’ailleurs, c’est juste humain.
Vous avez peut-être eu des comportements à risques pour votre entourage ou/et pour vous-même : consommation excessive de drogues (alcool, cannabis, cocaïne ou autre), violence envers vos proches (verbale ou/et physique), tentative(s) de suicide, etc.
À force d’accidents, souvent remarqués par votre entourage, vous êtes amené à côtoyer l’univers psychiatrique.
Vous vous dites peut-être que vous aurez la réponse à votre mal-être et que les professionnels de santé trouveront un moyen de vous guérir. C’est humain.
N’ayant pas de formation spécifique aux conséquences psychologiques de l’adoption, le fait que vous soyez adopté n’est pas vraiment pris en compte par le psychiatre. Vous lui racontez quand même ce qu’il se passe dans votre vie et dans votre tête.
Quels diagnostics pour les adoptés ?
Le diagnostic tombe après examen psychiatrique :
- Vous avez des troubles de la personnalité Schizoïdes.
- Vous êtes « borderline ».
Je scénarise mais c’est bien réel. Puisque c’est ce que la plupart des adoptés me décrivent après avoir fréquenté les instituts psychiatriques.
Remarque :
Ce n’est pas parce que les psychiatres ou infirmières « font mal leur boulot ». En réalité, ils font avec ce qu’ils ont appris. La notion d’adoption et de blessure primitive n’était pas forcément dans leur programme universitaire (surtout en France). Il en sort alors les diagnostics les plus communs qui se rapprochent le plus des comportements apparents.
Les deux ouvrages de Nancy Newton Verrier sont une bonne base (psychologique et scientifique) pour commencer à comprendre comment la blessure primitive peut affecter notre personnalité à long terme. Vers la fin de son ouvrage Renouer avec soi, elle distingue le trouble lié à la blessure primitive de celui de la personnalité borderline.
Si vous voulez vous les procurer :
L’enfant adopté – Comprendre la blessure primitive
Renouer avec soi – L’adopté devenu adulte
Que faire de ces diagnostiques ?
La plupart des adoptés que j’ai rencontrés et qui ont été diagnostiqués, par les appellations vues plus haut, ne savaient pas vraiment quoi en faire.
Cela ne changeait rien à leur vie.
Pour les autres, le diagnostic justifiait leurs comportements récurrents. Ceci pouvait soulager un temps. Concernant les témoignages que j’ai pu recevoir, le mal-être et les comportements à risques persistaient.
Pour certains, le diagnostic devenait comme une excuse pour ne pas entamer de travail personnel sur leurs comportements.
Ces derniers tombent alors dans le découragement, voire la complaisance : « Oui mais tu sais, si je suis comme ça c’est parce que je suis malade, » donc « Je ne peux rien faire pour changer, » « Je suis comme je suis, » « Il faut m’accepter comme ça. »
Cette complaisance est difficile à vivre pour les proches qui sont impactés par les troubles du comportement de l’adopté.
Dans les cas les plus lourds, une blessure primitive non « soignée » peut générer une maladie mentale à un niveau physiologique. Ce qui justifie la difficulté d’agir efficacement pour soi. Je peux comprendre alors que c’est plus une question de « capacité » que de « volonté ».
Il faut avant tout veiller à ce que l’établissement des diagnostics psychiatriques n’encouragent pas les patients à en faire leur nouvelle identité. Au risque qu’ils se comportent à fortiori comme des « malades ».
Se reposer sur un diagnostic peut conduire à une déresponsabilisation émotionnelle.
Certains vont donc s’en remettre aux médicaments qu’on leur a prescrits, pour une durée indéterminée, sans essayer autre chose.
Le milieu français de la santé est encore frileux aux thérapies complémentaires qui favorisent la responsabilité émotionnelle de chacun. Il est difficile de justifier leur entrée dans des instituts psychiatriques afin d’en reconnaître les bénéfices, faute de consensus scientifique.
La méditation commence, tout comme l’hypnose, à trouver grâce aux yeux du milieu médical progressivement.
Le choix d’un traitement médicamenteux peut être vu comme une solution miracle pour certains adoptés. Cependant, la plupart se rendent compte qu’il y a un travail personnel à poursuivre afin de se sentir épanoui.
Des accompagnements thérapeutiques complémentaires à un professionnel de santé sont proposés sur cette page.
Les avantages de la période en institut psychiatrique :
Oui, il y a des avantages et pas des moindres pour les personnes fragilisées.
1) Encadrement pour les comportements à risques
Si vous êtes adopté et que vous faites des tentatives de suicide à répétition, c’est la plupart du temps un appel au secours : perte de sens, sentiment d’injustice profonde, victimisation, auto-sabotage… les motivations à vous auto-détruire peuvent être nombreuses.
Cependant, si vous ne laissez pas de chance à votre vie de continuer cette expérience terrestre, vous ne saurez jamais ce qui vous attendait de meilleur à l’avenir.
Si vous ne vous sentez pas la force de lutter, ni de vous préserver physiquement, alors le cadre clinique ou psychiatrique est une solution pour vous y aider ; le temps de retrouver vos forces.
2) Période de pause
Certaines personnes se sentent perdues et n’arrivent plus à s’adapter à la société dans laquelle ils vivent. Ils ne s’y reconnaissent pas et n’en comprennent pas les codes. Il y a une perte de sens sur notre place dans le monde extérieur.
À fortiori pour les adoptés qui sont en constante adaptation avec leur entourage.
Une incapacité à se responsabiliser grandit :
- Une situation professionnelle instable (voire aucune) de longue durée s’installe.
- L’administratif est complètement laissé de côté
- Les problèmes financiers surviennent jusqu’à ce qu’il y ait un événement fort qui justifie l’entrée dans l’univers clinique ou psychiatrique.
C’est alors une période en dehors du monde extérieur qui se présente. Une opportunité de se reposer, loin des contraintes sociétales et des responsabilités demandées habituellement.
Vous avez donc plus « d’espace intérieur » pour vous-même.
C’est l’occasion de faire une introspection pour, plus tard, « mieux revenir« .
3) Expérience d’apprentissage
Entrer dans l’univers psychiatrique n’est généralement pas quelque chose dont on se vante. Même s’il n’y aucune honte, un sentiment d’avoir raté quelque chose à un moment de notre vie est bien présent. Surtout pour un adopté qui se sent la plupart du temps inadapté.
Cette expérience ne laisse donc pas indifférent. Elle fait réfléchir et ouvre une perspective nouvelle parfois, pour ceux qui sont prêts à la voir.
Certains adoptés ont compris qu’ils ne voulaient plus se mettre dans de tels états et fréquenter le milieu psychiatrique. D’autres pensent, souvent inconsciemment, qu’ils ne méritent pas mieux et y reviennent.
Là encore, il n’y a pas de jugement. Chacun son rythme.
Conclusion
Me concernant, je n’ai pas côtoyé l’univers psychiatrique. Je me suis cependant demandé, à de nombreuses reprises, si je ne m’y sentirais pas mieux à un moment de ma vie où je ne trouvais plus ma place dans le monde.
Progressivement, j’ai fait le travail personnel que j’avais à faire. J’ai vu moi-même des thérapeutes et psychologues. Puis, j’ai rencontré des adoptés qui sont allés où je ne suis pas allé. J’ai donc été très attentif à leurs récits. J’ai également fait au mieux pour synthétiser leurs ressentis, ainsi que les miens vis-à-vis de cette expérience.
Encore aujourd’hui, même en étant professionnel, je n’hésite pas à me faire accompagner si j’en ressens le besoin.
Ce en quoi je crois avant tout, c’est à l’histoire et aux ressentis que chacun me transmet. C’est sur cette base que nous travaillons.
Si vous voulez entamer un travail personnel ou avoir quelques réponses pouvant vous éclairer un peu plus… Vous pouvez réserver votre séance avec moi ici.
Prenez soin de vous.
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