Certains enfants adoptés, et même à l’âge adulte, ne ressentent pas le besoin de connaître leurs origines alors que d’autres les mettent en avant. Pourquoi ? Dans cet article, je vous donne des explications.
Avant de lire : Cet article est basé sur des études et témoignages cliniques d’adoptés. Certains ne veulent pas connaître leurs origines parce qu’ils arrivent à faire sans et d’autres non. Personne ne peut donc être généralisé. Il est important de toujours garder un recul tout en restant ouverts aux informations qui vous parlent. Bonne lecture.
Garantir le sentiment d’être bien intégré
J’ai pu rencontrer des adoptés qui manifestaient le besoin explicite d’appartenir à leur pays d’origine, alors que d’autres étaient agacés par ces derniers.
Ces « autres » sont généralement fiers d’appartenir à leur pays d’adoption et se considèrent bien « enracinés » à celui-ci ; ils se sont identifiés aux habitants, adapté à la culture et s’y sentent bien.
Les adoptés qui ne se posent pas de questions sur leurs origines ne veulent pas se lamenter. Ils ont décidé de voir le bon coté de la « médaille, » et ont su avancer avec, malgré qu’ils n’aient pas d’informations sur leur histoire personnelle.
Il y a en général 2 catégories :
- Ceux qui vivent très bien sans connaître leurs parents biologiques et leur histoire avant l’adoption, qui sont notamment en harmonie avec leur famille adoptive.
- Ceux qui restent très fermés quand on évoque la question des origines, avec un refus d’aller explorer cette part de leur histoire, comme si il y avait une partie d’eux-mêmes qui ne devait pas être touchée.
Du déni ?
En parlant avec les adoptés de la deuxième catégorie, leurs réactions face à la question des origines étaient souvent affirmatives, en disant des choses comme :
“On s’en fiche, le passé appartient au passé.” ou “Moi je me considère comme français (ou autre pays d’adoption).” ou encore “Mes parents j’en ai que deux, c’est eux que j’aime !”
C’est comme si pour eux, c’était « mal » de reconnaître que leur histoire d’avant leur adoption pouvait avoir une importance. Alors que ce serait tout à fait naturel d’un point de vue psycho-biologique.
Cependant, je comprenais ce genre de réaction puisque je tenais les mêmes propos auparavant.
J’ai été moi-même l’un de ces adoptés. Notamment parce que j’étais influencé par les clichés que mon pays d’adoption (France) se faisait de mon pays d’origine (Brésil). Quand j’étais jeune et qu’on parlait du Brésil à la télévision française, on exposait les danseuses du carnaval de Rio, les strings brésiliens sur les plages, la chirurgie esthétique et surtout le football (que je n’aimais pas). Rien de tout cela ne me donnait envie. Je ne pouvais pas m’identifier à ces représentations. Donc, pour ne pas y être associé et être pris au sérieux, je m’adaptais au mieux au vocabulaire et comportement français. Plus tard, je rejetais que le fait d’être adopté pouvait avoir un lien avec mes difficultés relationnelles et professionnelles. Je peux le dire clairement aujourd’hui : j’avais le profil de l’adopté en souffrance et dans le déni.
Le conflit de loyauté envers les parents adoptifs
Un conflit de loyauté commence sur l’idée suivante : On ne peut pas avoir d’autres parents que ceux qui nous élèvent, il faut choisir. Un adopté qui choisit sa famille adoptive sera donc loyal. Dans son inconscient, laisser la place à d’autres parents, c’est en quelque sorte trahir ceux qu’on a déjà.
Certains arrivent à trancher définitivement la question et n’en parle plus, d’autres ressentent de la culpabilité à l’idée de reconnaître leurs parents biologiques.
Lorsque l’enfant est adopté, il est préalablement séparé de sa mère biologique et vit la blessure primitive. Ce qui devait être la relation initialement la plus sûre ne l’est plus. Si celle-ci ne l’est pas, quelle relation le sera alors ?
Pour surmonter cet événement, certains adoptés créent une distance vis-à-vis de leur histoire pour se protéger.
Éviter de revenir sur le passé / traumatisme
“Le passé appartient au passé. Moi je m’intéresse au présent” disais-je à ma psychanalyste lorsque j’étais étudiant. C’était une façon habile de mettre de côté les questions qui m’embêtaient.
Il est souvent effrayant pour les adoptés de parler du passé puisque notre inconscient renferme la blessure qu’on veut tant oublier. On se tourne alors vers le présent et avançons au jour le jour.
Ce comportement de déni peut fonctionner quelque temps quand il ne pose aucun problème immédiat dans la vie.
Hélas, le présent parle souvent de lui-même pour certains adoptés :
Des difficultés d’intégration dans le milieu professionnel, ou au contraire une « suradaptation », un rapport à l’autorité difficile, de la dépendance affectives dans les relations amoureuses, des difficultés à exprimer ses émotions de façon équilibrée, enchaînement de relations « toxiques. », etc.
C’est comme colmater une brèche dans un bateau avec du scotch adhésif : ça semble marcher mais à très court terme.
Quand ma psychanalyste me demandait ce qu’il se passerait si je m’intéressais à mes origines, je répondais : “Si je commence, je n’en finirai pas, ça me prendra surement tout mon temps…”. Sans m’en rendre compte, c’était un aveu important que je venais de faire. J’explorai cette question 4 ans après.
La mère biologique ou « l’abandonnante »
Parfois, il arrive que des adopté(e)s en ont marre qu’on leur parle de leur « vraie » mère et je comprends puisque cette appellation est maladroite : elle sous-entend que la mère qui nous a élevée est « fausse ».
Même si c’est le cas dans l’inconscient du bébé, notre mécanisme d’adaptation à la nouvelle situation fait qu’on doit considérer notre mère adoptive comme notre « vraie » mère. Il faut donc aborder ce sujet intelligemment.
Un enfant adopté a en réalité deux mères :
- La mère de cœur avec laquelle on a partagé notre vie.
- La mère de sang avec laquelle on a partagé nos premiers instants.
Par déni, certains se sont arrangés pour ne rien savoir sur leur mère biologique.
Un enfant qui est séparé de sa mère, dès le début de la vie, perd son plus sûr repère auquel il faisait confiance. En plus d’être ressentie comme un abandon, cette séparation peut aussi être ressentie comme une trahison.
La plupart du temps, une mère biologique abandonne son enfant à cause de contraintes extérieures : trop jeune, trop pauvre, malade, mal entourée, etc. Après avoir gardé son bébé 9 mois dans son ventre, elle souffre aussi de cette séparation. Elle ne peut qu’espérer un avenir meilleur en le confiant à un orphelinat ou à des personnes pouvant le faire adopter.
Malgré la pertinence de son choix, elle sera vue comme “l’abandonnante”. Un statut accusateur qui nourrira des émotions de colère, rancune, voire de mépris, qui seront refoulés dans l’inconscient, se traduisant comme un comportement d’indifférence dans la vie quotidienne.
La mère biologique, devenue abandonnante, n’est donc considérée que d’un point de vue logique et factuel : c’est-à-dire comme une simple « étrangère, » à laquelle nous n’avons aucun « compte à rendre ».
Finalement, pourquoi faire face à notre mère biologique si on a appris à vivre sans elle ? Autant laisser les choses telles qu’elles sont. À chacun son choix.
Selon moi, notre mère biologique doit être vue comme un être humain ; Avant d’être parent, c’est une personne qui fait ses expériences et ses erreurs. Non pas que nous sommes une erreur nous-même : ce qui était une erreur, c’était de nous concevoir dans des conditions défavorables. Et bien souvent, ce n’était pas l’intention de notre mère biologique… C’est quelque chose que nous pouvons comprendre.
Selon moi, si votre mère biologique vous a confié à l’adoption et que vous avez la chance de la retrouver, allez-y. Mais si vous vous rendez compte que vous n’avez rien en commun avec elle et que vous ne ressentez pas d’amour, alors laissez la potentielle colère ou déception passer… C’est la confirmation que votre mère biologique n’aurait peut-être pas réussi à vous élever correctement. Votre adoption aura donc plus de sens.
Conclusion :
Pour les adoptés heureux, si vous lisez ces lignes et que vous êtes un adopté qui affirme être bien dans sa peau et heureux dans sa vie (et c’est tout ce que je vous souhaite), je ne vous contredirai pas. Chaque adopté a son propre vécu et sa façon de le percevoir.
Pour les autres, nous avons connu le déni, c’est un mécanisme de défense naturel. Moi-même je l’ai connu (voir article ici). Nous n’osons pas nous aventurer dans cette réflexion mais dans le fond, nous savons pertinemment qu’il y a une zone d’ombre qui a besoin d’être éclaircie. C’est alors le début d’une grande recherche et de découvertes sur nous-mêmes.
Pour terminer, je trouvais important de vous communiquer le témoignage d’une adoptée qui vit bien son adoption. J’ai trouvé utile de le publier ici pour mettre en évidence un autre point de vue : VOIR LE TÉMOIGNAGE ICI
Si vous sentez le besoin de vous faire accompagner par un professionnel, voici différents types accompagnements pour vous aider.
Prenez soin de vous.
Mots clés : enfant adopté, adopté je le vis bien, quête des origines, parents biologiques
Recherches utilisées pour trouver cet article : https://www sadoptersoi com/pourquoi-certains-adoptes-ne-ressentent-pas-le-besoin-de-connaitre-leurs-origines/
Une réflexion sur « Pourquoi certains adoptés ne ressentent pas le besoin de connaître leurs origines ? »